Voyages et Incertitudes
Pourquoi donc éviter l'incertitude comme nous essayons de le faire si souvent ? Pourquoi donc ce besoin dans lequel nous sommes de tenter d'en savoir le plus possible à l'avance et d'avoir un maximum de choses sous contrôle ? Y aurait-il là une appréhension de la surprise ? Et, cela ne nous priverait-il pas de certains plaisirs ? Toutes ces interrogations ne se retrouvent-elles pas dans nos manières de voyager ? Du moins de celles de la majorité d'entre nous...
Pas une destination référencée sans guides multiples et/ou blogs pour nous dire tout ce qu'il y a à y faire, à y voir et à savoir. La découverte ne me semble plus être le fait de découvrir quelque chose dont nous n'avons pas connaissance. Cela semble plutôt être, et de plus en plus, de voir de nos yeux ce qui doit être vu et dont nous avons préalablement eu connaissance, et dans le même esprit, de faire ce qui doit être fait. Ainsi, tout apparait de plus en plus calculé et chronométré. Il est vrai que ces voyages sont souvent couteux, et donc d'une durée restreinte prise sur nos vacances. Alors, cela ne provoquerait-il pas un souci de rentabilisation de ces derniers ?
Lors de mon dernier séjour à Chiang Mai, il y a un peu plus d'un an, une minorité des touristes que j'ai vue arriver le matin commençait par se poser et/ou se reposer du voyage. Pour la majorité, soit ils posaient leurs sacs et repartaient assez rapidement, soit ils se mettaient à préparer leur programme avec la personne présente à l'accueil, avant de partir se promener une fois leurs bagages déposés. Et j'en ai vu... puisque j'avais tendance à lire ou zoner tranquillement en bas le matin, avant de décoller entre 12 et 13. Je me souviens d'en avoir discuté à différentes reprise avec un Suisse qui trainait aussi le matin et qui trouvait cela dommage.
Pourquoi donc, une fois arrivé, ne pas commencer par se reposer du voyage et prendre son temps ? Ne court-on pas déjà trop dans notre quotidien pour en plus devoir le faire en vacances ?
À Ulan-Bator, j'ai été surpris de voir des jeunes me dire que rester plus de deux jours, c'était trop, tout comme je suis surpris de voir peu d'occidentaux en dehors des axes touristiques. Certes, ce qu'il y a à y voir peut largement se faire en deux jours. Mais, comme dans toutes les villes, prendre le temps de circuler en dehors des sentiers battus n'est-il pas plein de richesses ? Ce que l'on peut voir et découvrir ainsi peut être riche d'enseignements sur le peuple que l'on croise, sur leur manière de vivre, sur la réalité de leur vie ? Se promener simplement et au hasard dans les recoins d'une ville peut être source de bien des découvertes, bien des émerveillements, ainsi que parfois des coups d'adrénaline imprévus...
Existe-t-il donc encore beaucoup de voyages sans programmes qui n'ait été organisé avant le départ ou en arrivant sur place ? J'ai l'impression que non, mais je peux me tromper.
Personnellement, je trouve beaucoup plus jouissif de partir en n'en sachant le moins possible et avec un programme minimaliste. C'est-à-dire, en connaissant son premier point de chute, son point de retour avec sa date et l'objectif/la raison du voyage. Et, au milieu ? Laisser la place à l'improvisation et à l'imprévu en fonction de l'envie du moment, ce qui inclut d'éventuellement décider de ne rien faire. S'informer un minimum permet d'éviter toutes interprétations, projections et à priori, fruits de nos lectures, des informations qu'on y trouve. Je trouve que cela permet d'être encore plus dans le ressenti, dans l'accueil de ce qui se passe et qui vient.
Parmi vous qui me lisez, combien y en a-t-il donc qui ont déjà voyagé ainsi ? Je serais curieux de le savoir, tout comme je serai curieux de connaître votre propre ressenti, de savoir ce que vous en pensez. Peut-être que certaines ou certains me le diront.
Bon, tout ça, c'est un point de vue tout à fait personnel... qui peut être anxiogène pour certains, j'en ai bien conscience... Un point de vue qui ne nie pas l'existence de destinations ou partir ainsi peut s'avérer dangereux, comme dans certains pays d'Amérique latine. Mais, ce n'est pas impossible, cela demande simplement une adaptation en fonction des pays.
C'est donc mon ressenti, qui peut être faux. Ça se trouve cette manière générale de fonctionner participe à l'équilibre interne des individus. Et, si c'est bien le cas, alors, cela représenterait une certaine normalité. Ce fonctionnement qui me convient et que je trouve plus sain serait-il donc une ano(r)malie ? Peut-être ! Ou peut-être que le fonctionnement actuel n'est que le fruit d'une société de plus en plus insécurisante, normalisante et uniformisante. Et, si c'est cela, peut-être serait-il intéressant de varier de temps en temps. À chacun de voir par rapport à lui-même.
Et, vous, qu'en pensez-vous donc ?
Maintenant, pour autant, ne serait-ce pas intéressant de redonner sa place au temps et à l'incertitude dans nos manières de voyager ? Cela ne pourrait-il pas être source de rencontres imprévues avec d'autres (quel qu'ils soient, humains ou animaux), mais aussi avec soi ?
Et que pourrait-on en apprendre pour notre quotidien ? Qu'est-ce que cela pourrait donc lui apporter ?
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