Le don : un processus à la fois vertueux et vicieux (1/3)

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Donner est un acte engageant et impliquant. Il ne peut exister « sainement » sans faire le pari de la confiance. Il nous engage et nous implique dans notre acte. Un acte chargé de l’intention qui se profile derrière et de l’attente qui en découle (qu’elle soit consciente ou non). De ce fait, tout ce qui sera redonné sera tout autant chargé.

Dans mon article précédent, L’acte de donnerj’ai décrit le fonctionnement du processus du don avec ses différentes possibilités. Je vous invite donc, avant de poursuivre, à le parcourir rapidement si ce processus ne vous est pas familier. En effet, afin d’éviter les répétitions, je ne ferai que m’y appuyer sans le développer de nouveau.

 

Le don : un processus à la fois vertueux et vicieux (1/3)

C’est ce dont parlent  les huit processus de don proposés par Philippe Chanial dans son texte « De la boussole du don aux régimes de la relation interhumaine »[1]. A l’intérieur de cette boussole, il évoque quatre processus que je qualifierais de vertueux : donner pour que l’autre rende, donner pour que l’autre donne, donner pour donner, donner pour que l’autre reçoive ; et quatre autres que je désignerais comme vicieux : Donner à condition que l’autre rende (plus), donner pour que l’autre ne puisse rendre, prendre pour prendre, prendre ce qui a été pris, auxquels j’en ajouterais un cinquième : donner pour prendre.

  • Pourquoi vertueux ? Parce que chacun de ces processus est tourné vers une relation dissymétrique entre individus qui est gagnant/gagnant dans le temps, gagnant/gagnant par les bénéfices psychologiques ou matériels que chacun va en tirer. Nous sommes ainsi dans une dissymétrie positive. Ces processus induisent un rapport positif tourné vers l’autre mais avec soi.
  • Pourquoi vicieux ? Parce que ces processus, sous couvert de don, s’inscrivent dans la prédation, la possession et le pouvoir sur l’autre. Nous sommes dans une dissymétrie négative où il y aura toujours un perdant et un qui gagne sur l’autre.

Avant d’aborder ces processus, revenons rapidement sur un aspect du don dont je n’ai pas encore parlé : « l’étincelle déclenchante ».Tout don commence par le désir de donner. Ce désir :

  • Peut être conscient ou non conscient. Conscient lorsque c’est un acte prévu, prémédité : un cadeau pour  une fête, un anniversaire, etc. Et non conscient lorsqu’il est spontané : on donne à un indigent ou on décide de payer le café en arrivant devant la machine à café ou le repas lorsque la note arrive (lorsque nous ne l’avions pas initialement prévu bien sûr).
  • Peut venir d’un besoin intérieur comme d’un besoin extérieur, les deux pouvant exister en parallèle. Intérieur lorsqu’il répond à un besoin personnel, physiologique ou psychologique (parfois notamment lorsqu’il représente une compensation) :’est le cas lorsque donner nous fera du bien, qu’il nous apportera de la satisfaction, de la joie. Et extérieure lorsqu’il répondra à une demande : lors de moments institués comme les anniversaires, les mariages, les pots de départ, mais aussi lorsqu’on nous demande un service ou qu’un indigent nous aborde lorsqu'il fait l’aumône.

Ce désir, c’est ainsi les prémices à tout souhait de donner, que cela arrive dans l’instant ou se prépare dans le temps.

Alors, en fonction de ces besoins, quelles intentions peuvent exister lorsque nous donnons et que se passe-t-il ensuite en fonction du cercle dans lequel nous sommes ?

 

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[1] In Revue du MAUSS n°36. Marcel Mauss vivant, La Découverte, 2010.

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