Différences Femmes/Hommes 2/6 : Hormones sexuels et Inné/Acquis

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Rappel pour celles et ceux qui n'ont pas encore lu une des autres pages : les éléments de cet article sont tirés de recherches et comme pour toutes recherches, ce qui est présenté concerne une majorité de personnes d'un même genre et non l'ensemble de celles-ci. Pour cette raison, vous pourrez éventuellement ne pas vous retrouvez dans l'ensemble des résultats concernant votre genre, comme c'est mon cas. Je reviendrai là-dessus lors de la réflexion critique que je ménerai en conclusion dans le dernier article sur ce sujet.  

 

2 - Présence et impact des hormones sexuels

Les recherches auxquelles font référence les articles que j’ai pu lire ont principalement parlé de 4 hormones sexuelles : la progestérone, la testostérone, l’œstrogène et la prolactine. Les hormones sexuelles sont essentielles pour les deux sexes, et les hommes et les femmes les produisent mais dans des quantités différentes. 

Dans la partie 1, nous avons vu que des neurobiologistes avaient identifié des différences structurelle et fonctionnelle entre le cerveau des hommes et celui des femmes, des différences qui seraient dues aux hormones sexuelles. En effet, les recherches menées par l’équipe de Markus Hausmann ont montré qu’« elles influençaient la communication entre les hémisphères et modifiaient aussi le degré d'asymétrie du cerveau ». Ainsi, plus il y a de progestérone et plus le fonctionnement du cerveau sera symétrique. D’où, d’ailleurs, les variations de fonctionnement chez les femmes en fonction de leurs périodes d’ovulation, ce qu'on a vu précédemment. 

Différentes recherches auraient aussi identifié « l’instinct maternel » dans le cerveau. L’instinct maternel est à entendre ici dans le sens de la préoccupation du nouveau né, c’est-à-dire l’instinct qui amène le parent à s’en occuper, et non pas l’amour maternel qui relèverait plus de la construction culturelle (comme l’a très bien montré Elisabeth Badinter dans l’amour en plus). Ainsi, comme l’ont montré Craig kinsley (Professeur de neurosciences) et Kelly Lambert (professeur de neurosciences comportementales et de psychologie), « Les hormones de la grossesse stimuleraient les neurones de l'air préoptique médiane afin d'anticiper les besoins liés à la maternité : les neurones remodelés permettraient à la mère de disposer de toute la panoplie des comportements maternels nécessaires pour nourrir et protéger ses petits. » Mais ces modifications ne touchent pas que les mères, les pères sont aussi concernés. Ainsi, comme les mères, les pères sont biologiquement sensibles à leurs enfants, mais ils interagissent de manière différente avec eux. Les biologistes ont montré que, comme les femmes enceintes, les futurs pères subissent des modifications physiologiques : notamment l’augmentation de la concentration de prolactine (hormone qui favorise la production de lait chez la mère et qui réduit le désir sexuel), la diminution du taux de testostérone d'environs 1/3 dans les premières semaines qui suivent l'accouchement, une dépression « post-partum » qui toucherait 4% des pères. 

La diminution du taux de testostérone réduirait la violence des mâles et favoriserait ainsi la survie des petits dans les différentes espèces de mammifère. Selon Les études menées par Raymond Baillargeon (psychologue) sur des enfants de 17 à 29 mois, les effets de la testostérone sur le cerveau contribueraient aux différences sexuées observées en matière de comportement violent dans la majorité des espèces de mammifère. Mais comportement violent ne veux pas obligatoirement dire agressivité. A l’inverse, plusieurs études ont montré que l'agressivité était lié au taux de testostérone prénatale, et non pas de l’évolution du taux de testostérone que l’on peut trouver chez les individus, quel que soit le genre. L’impact de la testostérone prénatale concerne aussi les filles. Ainsi, plus le  bain amniotique dans lequel aura baigné le foetus sera chargé de testostérone et plus l'enfant qui naîtra aura des chances d'être agressif dans ses premiers mois et première année. Une agressivité qui s'atténuera ou se renforcera en fonction des influences culturelles et environnementales. L'agressivité comme la violence sont  ainsi d'abord une caractéristique physiologique différente d'un individu à l'autre (et d''un genre à l'autre pour la violence comme nous le verrons dans la partie 4 et la partie 5) et ensuite une spécificité socioculturelle sur laquelle le psychologique aura une forte influence (projections, névroses, angoisses, etc.).  

La testostérone prénatale n’agit pas uniquement sur l’agressivité des individus, elle agirait aussi sur la « préférence des jeunes enfants en matière de jouet façonnée » comme nous l’explique Lise Elliott (professeur de neurosciences). Clipart-17.jpg Les garçons, dès le plus jeune âge iraient spontanément vers des camions et des objets alors que les filles iraient vers des poupées. Des préférences qui ont été corroborées par les observations de singes vervet faites par les psychologues  Melissa Hines et Gerianne Alexander.  Les petits de ces derniers, comme les petits d'humains vontplus spontanément vers des camions quand ce sont des mâles et vers des poupées quand ce sont des femelles.  Les résultats de cette étude furent une surprise pour moi, j’avais toujours pensé que la préférence en matière de jouet des enfants était dûe à l'influence des parents. 

Le lien hormones sexuels et trouble de l’humeur est lui, bien connu des femmes. Ces dernières, comme un certain nombre d’entre elles le sait déjà, sont plus sensibles lorsqu'il y a des pics d'hormones sexuels, notamment juste avant l'arrivéedes menstruations. Les pics d’œstrogène interfèrent notamment avec la sérotonine et augmentent le stress par la stimulation de production cortisone (l’hormone de stress). 

Ces modifications dont nous venons de parler touchent les femelles et les mâles des mammifères en général, pas seulement des humains. 

Comme nous le dit la journaliste scientifique Erica Westly, « du stade embryonnaire à l'adolescence, les hormones sexuelles, surtout la testostérone et les œstrogènes, jouent un rôle essentiel dans le développement cérébral et, plus tard, dans la régulation de l'humeur. » 

Mais n’oublions pas que la structure cérébrale et les hormones ne sont pas les uniques et principaux éléments qui nous façonnent. Ce ne sont que certains parmi d’autres.

Après le contenu de ces deux premières parties, que penser de l’inné et de l’acquis ? Qu’est-ce que les résultats des recherches existantes peuvent donc en dire ? 

3 – La question de l’inné et de l’acquis

La question de l’inné et de l’acquis est toujours une question sensible et qui pose débat, l’idée d’un inné qui existerait étant parfois dérangeant pour certains et mal utilisé par d’autres. Il est vrai que l’inné condamnerait les individus à un déterminisme dont ils ne pourraient sortir, ce qui serait le risque de poser certains comme supérieur à d’autres. Or, tout cela n’est-il pas complètement absurde au regard de notre connaissance de l’histoire des individus ? Rejeté l’idée de l’inné ne pourrait-il alors nous plonger dans celle de l’acquis ? Mais penser ainsi que tout serait acquis n’est-il pas tout autant absurde ? Cela ne reviendrait-il pas à dire que tous les individus sont égaux à la naissance et que ce sont les vécus qui créent les différences ? Or la biologie a montré que ce n’était pas le cas : dans la nature, au niveau biologique, c’est l’injustice qui prime. Ne naissons-nous pas inégaux les uns vis-à-vis des autres ? 

Nous avons vu que des différences existaient dès la naissance entre les hommes et les femmes, notamment au niveau du cerveau et des comportements, et que certaines étaient liées à la testostérone prénatale. Dès différences qui font que certaines et certains ont plus ou moins de capacités dans des domaines différents. Cette fameuse injustice biologique qui existe dans la nature, nature dont nous faisons partie en tant qu’espèce animale parmi les autres. Il existe donc de l’inné. Seulement, les études et recherches existantes ont montré que cet inné n’était pas déterminant à vie. Ce qui nous vient à la naissance évolue avec l’expérience, le vécu et en fonction des environnements socioculturels dans lesquels nous vivons. Des études ont mêmes montré que certains de nos gènes évoluaient après la naissance en fonction de nos vécus.  L’inné et l’acquis ne seraient-ils pas alors complémentaires, tout comme féminin et masculin d'ailleurs ? 

Jill Goldstein a montré qu’il existait un rapport entre l’action des hormones sexuelles dans l’utérus et la dimension d’une région cérébrale. Cela laisse à penser qu’une partie des différences qui existent entre hommes et femmes serait présente dès la naissance, elles ne seraient pas dues à l’influence socioculturelle et éducative. 

Clipart 18 Mais, s’appuyant sur différentes recherches, Lise Eliot (professeur de neurosciences) a expliqué que « même s’il existe un amorçage inné, les préférences des enfants se renforcent sous l’influence.  Les parents privilégient les jeux considérés comme appropriés surtout chez les garçons, Clipart 16 et, à partir de l’âge de trois ans, les copains imposent – encore plus que les adultes –   les jeux qu’ils jugent adaptés à leur sexe. (…) La plupart des différences sexuées sont ainsi initialement faibles, mais sont amplifiées à mesure que les filles et les garçons sont exposés à une culture sexuée, que ce soit dans les jeux, les compétitions, à l’école… voire chez eux. »  

Les études menées en 2005 et 2007 par le neurobiologiste Karin Kucian et ses collègues du Service de pédiatrie de l’Université de Zurich corroborent le fait que des caractéristiques innées évoluent avec le temps et l’expérience. Ces études portaient sur la manière dont filles et garçons traitent les informations spatiales. Les résultats ont montré qu’ils les traitent de manières de plus en plus différentes avec l’âge et en fonction de leurs activités. 

Sans donner de réponses précises au débat inné/acquis, ces quelques recherches ne viennent-elles pas nuancer la question en montrant un lien existant entre l’inné et l’acquis ? Ne pourrait-on ainsi dire que l’acquis s’appuierait sur une part d’inné qu’il ferait évoluer ? Cela ne poserait-il pas leur complémentarité ? 

Maintenant, que nous disent ces différences initialement innées entre garçons et filles et que nous disent les différences de l’acquis ? Ne posent-elles pas simplement que l’égalité entre hommes et femmes comme entre tout mammifère d’une même espèce, donc entre tout animal Homme, ne peut exister ? Et ne pose-t-elle pas en plus qu’il y aurait plutôt une complémentarité qui devrait nous inviter à chercher plus d’équité entre les individus, quel que soit le genre ? Plutôt que d'être dans la recherche d'un égalité entre les sexes, ne serait-ce pas plus judicieux d'être dans une recherche d'équité ? Et ne serait-ce pas intéressant d'éduquer dès le plus jeune âge les futurs générations dans ce sens ? 

Ne serait-il donc pas intéressant, maintenant, de jeter un œil sur les différences entre garçons et filles que les différentes recherches ont pu mettre en lumière. 

 

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Publié dans Au nom des femmes

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